On voudrait s’aimer mieux. Mais comment faire quand on cumule les mandats : en couple hétérosexuel cohabitant et parental, le tout noyé dans les eaux troubles du patriarcat ? De la tasse qui traîne à la libido morne plaine, des émotions mal partagées à la mauvaise foi bien distribuée, un homme et deux femmes se livrent à une plongée pop-analytique dans l’espace inouï de l’amour en ménage.
Les Filles de Simone nous ont emballés avec leurs trois précédents spectacles, qui abordaient la difficulté d’être mère, le corps des femmes ou encore la vie relationnelle, affective et sexuelle des collégiens. Elles prennent ici le couple à l’abordage, évacuant les thèmes de la rencontre ou de la rupture au profit du milieu : ces années à « faire couple », comme on peut, abreuvés des représentations écrasantes et inégalitaires de l’amour à travers la culture populaire. Elles composent une autofiction tissée de confessions personnelles – celles des trois interprètes – et de références historiques, sociologiques ou artistiques. Avec humour et finesse, elles nous proposent une traversée du couple à la jonction de l’intime et du politique et donne des pistes pour le réinventer !
Thierry Malandain et Martin Harriague, respectivement directeur et artiste associé du CCN de Biarritz, se mesurent pour notre plus grand bonheur aux chefs-d’œuvre d’Igor Stravinski. L’Oiseau de feu, d’abord. Depuis la création du ballet à l’Opéra de Paris en 1910, l’oiseau s’est fait tantôt phœnix, tantôt icône révolutionnaire. Thierry Malandain s’inspire ici de la figure, porteuse d’espoir, de François d’Assise. Sa pièce, qui s’ouvre en noir avant d’imposer ses couleurs chatoyantes puis un blanc immaculé, sculpte l’espace en lignes épurées, en ondulations et effets de vague exécutés par les danseurs avec précision et fluidité.
Vient ensuite Le Sacre du printemps, dont la musique accompagne jusqu’à la transe le rite païen sacrificiel célébrant l’arrivée du printemps. Martin Harriague y imprime dès le début sa propre vision, faisant surgir ses danseurs des entrailles d’un piano, avant de déployer sa danse, physique et terrienne, vers le ciel. Nous assistons émerveillés à la renaissance de la nature, reprenant ses droits avec une force sauvage et menaçante. Les vingt danseurs du Malandain Ballet Biarritz, d’une rigueur à couper le souffle, réinventent magistralement ces deux classiques.
Monsieur T. a poignardé sa femme. Interrogé par la police, il n’a pas semblé être concerné par son propre cas. L’expertise des médecins a conclu qu’il avait succombé à une crise aiguë de démence, manifestation exceptionnelle de la maladie de A. Telle est l’entrée en matière de ce spectacle poignant adapté du roman d’Olivia Rosenthal, récompensé en 2007 par le prix Wepler-Fondation La Poste. L’autrice y décrit dans une langue fluide et précise la perte d’identité, de repères et l’effacement progressif de l’humanité d’un homme souffrant de la maladie d’Alzheimer.
Le metteur en scène Mathieu Touzé confi e à Yuming Hey la narration et l’interprétation des multiples figures de cette histoire : le malade, ses proches et ses médecins. Autant de voix qui s’entrecroisent, tentant de ramener Monsieur T. à des souvenirs qui lui échappent sans cesse. Le comédien, seul en scène dans un décor blanc sur lequel glissent des images vidéoprojetées, est parfois rejoint par la troublante voix off de Marina Hands. On connaît la grande palette de jeu de Yuming Hey, aussi gracieux en Mowgli dans la comédie musicale Jungle Book de Bob Wilson, que fascinant dans la série d’anticipation Osmosis. Il est ici magnétique, portant avec force et douceur la polyphonie tourmentée de ce texte.
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Elles se prénomment Jordane, Nelly ou Valentine. Leur curiosité et leur désir vont les pousser dans les bras de Barbe-Bleue, et aucune ne résistera à ouvrir la porte du cabinet interdit. Une transgression qui leur sera fatale. Mais si leurs retrouvailles, en tant que fantômes, leur donnaient l’occasion de déjouer cette issue funeste en se risquant à affronter leurs peurs ?
Ce spectacle audacieux, à l’écriture et à la mise en scène aussi maîtrisées qu’enthousiasmantes, a valu à Lisa Guez de recevoir le prix du Jury et le prix des Lycéens du festival Impatience en 2019. Dépoussiérant le conte de Perrault en puisant dans ses parts obscures et sa force initiatique, l’artiste questionne nos imaginaires féminins, révèle les rapports de domination dans notre société et débusque ce mal qui se cache en chaque femme et la dévore à coups d’impératifs. Les cinq comédiennes ont forgé chacun des témoignages fictionnels du spectacle. Elles interprètent avec détermination et humour les mises en situation de leurs personnages, qui s’entraident pour trouver des espaces de résistance face à leurs «prédateurs», qu’il s’agisse de l’emprise d’un homme ou de l’autoconditionnement qui entrave leur liberté.
Après avoir pris à l’hameçon, par mégarde, une sirène dans les eaux gelées d’un fjord, un plaisancier traverse terres et mers pour la retrouver. Et pour cause: elle a jeté sur lui une terrible malédiction !
Après Bigre (accueilli en 2015 et récompensé par le Molière de la meilleure comédie), Olivier Martin-Salvan et Pierre Guillois reforment leur irrésistible duo dans ce nouveau joyau burlesque, imaginé pour deux comédiens et… des cartons. Le premier, imposant et engoncé dans un costume trois-pièces, ne bouge pas d’un poil et nous débite cette histoire abracadabrante avec des mots que l’on ne saisit que de temps à autre. Le second, aussi long que maigre et vêtu d’un maillot de bain, s’agite dans tous les sens. Armé de boîtes et d’affichettes en carton sur lesquelles des mots sont écrits au feutre noir, il se démène tant bien que mal pour illustrer les péripéties, campant à lui seul personnages, moyens de locomotion, lieux et paysages. Au terme d’une course à cent à l’heure, leur énergie survoltée aura transformé le plateau en capharnaüm ! Ne ratez pas ce duo complice et virtuose, qui concentre le meilleur des Monty Python et de Laurel et Hardy : c’est un véritable bonbon, qui délectera toutes les générations.
Ce spectacle a été récompensé par le Molière du spectacle de théâtre public en 2022.
Au Pays-de-la-Fabrique-des-Objets-du-Monde, Tao et Li-Na habitent un village à flanc de montagne. Leurs parents partis travailler à la ville, les deux enfants vivent avec les anciens. Jusqu’au jour où le père de Tao revient pour l’emmener avec lui. Désespérée, Li-Na part sur les traces de son ami et, au terme d’un périlleux voyage, le retrouve, épuisé par l’usine. Elle rejoint alors la chaîne, aux côtés d’autres gamins, éteints, comme Tao. Pour dénoncer le travail illégal des enfants, Li-Na commet alors la plus fantasque des insurrections.
Alertés par les questions de liberté, d’union et de désobéissance, Olivier Letellier et Yann Verburgh sont convaincus qu’un geste poétique peut engendrer d’incroyables conséquences politiques. L’histoire qu’ils inventent convoquent l’amitié, la nature comme terrain de jeu salvateur, l’imagination comme outil de résistance face à une autorité destructrice. Sur scène, cinq artistes à la fois danseurs, marionnettistes, jongleurs-diabolistes et comédiens incarnent autant de voix que de points de vue sur cette fable, dans une joyeuse effervescence. Une création qui nous interpelle et nous interroge, sans rien imposer. Comme un appel d’air…
Icare, 4 ans, habite une ville qui effraie son père : les rues, le tram, le parc, les Autres. De jour comme de nuit, Icare vit sous haute protection : combinaison, gants, casque. Le père aime son fils. Le père protège son fils. Icare n’ose rien. Sauter le muret ? Trop risqué ! Mettre le couvert ? Trop dangereux ! Accoster Ariane ? Trop audacieux ! Mais les moqueries des autres, ça fait mal aussi. Alors, Icare décide de grandir, malgré les interdits de son père. L’aventure commence ici − celle de la vie − lorsque sur le chemin de l’autonomie, de petites ailes lui poussent dans le dos…
À la croisée du conte et du vraisemblable, Icare met en scène une lecture inédite du mythe éponyme, celle de l’éloge du risque. Comme une partition sur mesure où chaque discipline s’imbriquerait tout en nuances, cette pièce baignée d’un environnement visuel fort, réunissant théâtre, ombres projetées, univers circassien du trampoline et musique live vous promet un spectacle total, visuel et poétique. Recommandé aux enfants comme aux parents !
Après avoir banni son frère aîné du royaume, le duc Frédérick chasse de la famille sa nièce Rosalinde, dont l’impertinence et l’amour naissant pour Orlando, jeune homme à qui tout réussit, gênent le pouvoir en place. Révoltée par cette décision, la jeune Célia refuse d’abandonner sa cousine adorée et s’enfuit avec elle vers le bois d’Ardennes. L’une déguisée en page et l’autre en bergère, elles partent à la recherche du père de Rosalinde, qui s’est réfugié dans la forêt. Un lieu de nature sauvage et féerique où vont se croiser paysans, nobles, poètes et amoureux.
Jalousie, trahison, romance et confusion des genres sont au rendez-vous dans cette pétulante comédie de William Shakespeare, emmenée par neuf comédiens bouillonnant d’énergie et de générosité, à commencer par Barbara Schulz dans le rôle de Rosalinde et de son alter ego masculin Ganymède. Mêlant sa propre fantaisie à celle de l’auteur, Léna Bréban invite la chanson pop dans sa mise en scène et exploite toute la palette de jeu de ses interprètes, qui prennent autant de plaisir à jouer qu’à chanter. Entre les célèbres tirades shakespeariennes sont ainsi glissés avec malice des refrains bien connus signés Diane Tell, Lou Reed ou Michel Polnareff, témoignant que notre quête d’amour et de bonheur est éternelle !
Ce spectacle a été récompensé par le Molière du spectacle de théâtre privé, le Molière de la mise en scène dans un spectacle de théâtre privé pour Léna Bréban, le Molière de la comédienne dans un spectacle de théâtre privé pour la comédienne Barbara Schulz et celui de la comédienne dans un second rôle pour Ariane Mourier, et le prix du syndicat de la critique du spectacle privé en 2022. Léna Bréban a reçu le Prix SACD Nouveau Talent Théâtre en 2022.
Léonte et Hermione, jeunes et magnifiques roi et reine de Sicile, attendent leur deuxième enfant. Mais Léonte, après avoir remarqué quelques signes d’affection entre sa femme et son meilleur ami, soupçonne ce dernier d’être le vrai père de l’enfant. Commence alors la tragédie, la descente aux enfers pour tout le royaume. Léonte croit voir la vérité quand tout le monde autour de lui est aveugle. Sa jalousie change sa perception du monde.
Avec seulement six comédiens et comédiennes qui jouent près d’une vingtaine de personnages, Le Conte d’hiver nous plonge dans l’esprit de Léonte, ses fantasmes et rêves de rédemption.
Fondé en 2018 entre Berlin et Paris, le trio à cordes Arnold est un objet rare et surprenant dans le paysage musical européen. Ces musiciens versatiles et lauréats de prestigieux concours internationaux se démarquent par la recherche constante d’une sonorité d’une grande homogénéité habituellement exclusivement réservée aux quatuors à cordes et d’un caractère d’ensemble d’une grande forceexpressive.