La Mouette

Jeune auteur avant-gardiste, Constantin est rejeté par Nina, qui lui préfère un écrivain célèbre. Il cherche désespérément la reconnaissance de sa mère, tandis que son oncle malade affronte l’idée de la mort.
Après avoir ausculté un drame familial dans Festen (accueilli à Sartrouville en 2018) et mis en scène Isabelle Adjani dans Opening Night, Cyril Teste s’attaque à une pièce majeure de Tchekhov. Dans cette nouvelle performance filmique, l’écriture théâtrale repose sur un dispositif cinématographique en temps réel et à vue. La maison de campagne où se déroule l’intrigue en est un personnage à part entière. Aux prises avec le désir de créer, l’amour non partagé et leurs rêves inassouvis, les huit interprètes y évoluent, de scènes chorales en moments intimes, suivis par des caméras. Elles saisissent leurs états émotionnels, l’énergie d’un geste ou la magie d’une présence, tandis que le travail minutieux du hors-champ traque l’intériorité de leurs sentiments dans l’envers du décor. Sur des toiles blanches, le temps du cinéma surgit dans le présent du théâtre, et les frontières se brouillent entre réel et fiction. Une prouesse artistique et un choc esthétique.

Calek

Calek Perechodnik, juif polonais, est ingénieur agronome. Après des études en France, il rentre en Pologne en 1937 et épouse Anna, avec qui il a une petite fille. Quelque temps après, ils déménagent dans le ghetto de Varsovie. Puis vient août 1942.
Charles Berling adapte et met en scène un texte majeur, qui raconte le sort d’une famille pendant l’occupation allemande, et le combat d’un homme qui puise la force de supporter la perte et la destruction. Survivant poussé par la nécessité impérieuse de témoigner, l’auteur a couché sur le papier les heures sombres de l’oppression, la vie dans le ghetto et les moments dramatiques qui ont précédé la déportation de ses habitants. Que puis-je écrire ? C’est la question lancinante qui traverse son journal, un texte fulgurant d’une quinzaine de pages où la description du quotidien se mêle au récit de l’insoutenable. Des mots écrits au présent qui nous parviennent, encore brûlants et chargés de la certitude que les feux du racisme et de l’intolérance ne sont jamais complètement éteints.

Elektrik

Apparue en banlieue parisienne au début des années 2000 et rapidement devenue l’emblème d’une génération, l’électro est une danse caractérisée par des mouvements de bras ultra-rapides, une gestuelle sophistiquée, une énergie frénétique. Huit danseurs, parmi lesquels trois champions de France et un champion du monde de la discipline, réinventent sur scène l’ambiance des night-clubs et des battles de rue, enchaînant les prouesses techniques dans un ballet entêtant.
Aux commandes de ce spectacle ébouriffant et haut en couleur : la chorégraphe espagnole Blanca Li, dont l’exubérance d’Electro Kiff avait déjà électrisé le Théâtre de Sartrouville en 2014. Sur des musiques baroques, des morceaux électroniques et techno, l’artiste compose une mosaïque de tableaux contrastés au fil desquels chaque interprète, seul ou en groupe, révèle sa puissance, sa sensualité et son univers artistique personnel. Tous nous communiquent leur joie de danser, infatigables jusqu’aux rappels !

Wonder Woman enterre son papa

Magnifier et transformer en bêtes de scène des acteurs sociaux peu reconnus, tout en rendant un hommage vibrant à son père disparu : tel est le projet de Sophie Cusset, qui nous invite à plonger dans le quotidien d’un Ehpad. On aurait tort de ne pas la suivre tant ce spectacle engagé et nécessaire distille la joie, le spectaculaire et la grandeur des relations humaines qui circulent dans ces établissements.

L’artiste compose un cabaret sombre et lumineux, où la théâtralité la plus débridée se mêle aux chansons, aux monologues intimes et aux percées oniriques. Quatre comédiennes emmènent ce ballet virevoltant, tour à tour résidente, aide-soignante, animatrice, fille, directrice… La truculence des dialogues rappelle les films de Bacri et Jaoui, la noirceur en moins et les paillettes en plus. Les sujets sensibles ne sont pas laissés de côté pour autant : les moyens qui manquent, le personnel à cran, le business qui rôde autour de la fin de vie. On rit et on pleure en compagnie de ces Wonder Women, super-héroïnes de tous âges qui pulvérisent les tabous.

Une femme se déplace

Si vous aviez le pouvoir surnaturel de voyager dans le temps de votre propre vie, où iriez-vous ? Que changeriez-vous ?
Tel est le défi qui attend Georgia, professeure de littérature dont le quotidien paisible va soudain se dérégler, au point de faire vaciller toutes ses certitudes, de remettre en question ses désirs et ses choix. David Lescot et Ludmilla Dabo, qui en 2019 nous ont transportés avec Portrait de Ludmilla en Nina Simone, se retrouvent pour une comédie musicale à la fois légère et profonde, digne héritière des bijoux cinématographiques signés Demy-Legrand, et que Broadway peut bien nous envier. Elle est menée tambour battant par dix chanteurs-comédiens et quatre musiciens, qui manient les mots, le chant et la danse avec virtuosité. De scènes intimistes en tableaux de groupe, d’instants théâtraux désopilants en échappées vocales bouleversantes, on se laisse envoûter comme Georgia par cette expérience aussi grisante que réjouissante.

Monstro

Nous avons le regret de vous informer que nous sommes contraints d’annuler ce spectacle

Le Collectif Sous le Manteau réunit sept circassiens spécialistes du mât chinois, qui renouvellent les formes de leur discipline en suivant ce credo : « Ensemble nous allons plus loin que nous ne le ferions seuls. »
Dans ce spectacle, ils réinventent une pratique habituellement solitaire et inscrite dans la verticalité pour créer un espace collectif, qui se joue aussi à l’horizontale et en diagonale. Démultipliant les trajectoires sur, entre et au milieu de sept mâts de hauteurs différentes, ils expérimentent leur individualité, négocient les conflits, domptent leur peur…
Chacun pour soi ou tous pour un, ils mettent en scène le monstre orgueilleux et peureux qui dort en nous, mais aussi l’élan qui nous pousse à dépasser en groupe nos limites et nos préjugés. Ils nous transmettent ainsi un plaisir monstre !

Debout sur le Zinc

Rencontre choc ! Depuis vingt ans, Debout sur le Zinc est LE groupe français, dont les inspirations vont du rock au jazz manouche, du blues au slam, avec des accents klezmer. Après avoir foulé les plus belles scènes de France et d’Europe, ils reviennent avec leur onzième album studio en forme d’hommage à Boris Vian, écrivain unique, joueur de « trompinette », auteur de tubes pour Henri Salvador, et soutien indéfectible du jeune Serge Gainsbourg.
Les chansons choisies par Debout sur le Zinc, écrites dans les années 50, restent résolument modernes : du mythique Déserteur au swinguant Ne vous mariez pas, les filles, la jubilation sera au rendez-vous. Le groupe nous fera aussi découvrir des textes inédits tels qu’Il est tardOn fait des rêves, ou encore Je te veux. Qui eut crû que Boris Vian, disparu à 39 ans, entrerait dans la prestigieuse collection de La Pléiade, grâce à son génie anti-conformiste ? Un hommage musical et littéraire à ne manquer sous aucun prétexte !

Yannick Jaulin

Yannick Jaulin nous revient pour une nouvelle jouissance langagière partagée ! Après s’être interrogé sur les mythologies religieuses dans Comment vider la mer avec une cuiller (2015), il part en quête linguistique pour mieux nous conter son amour des langues. Elles sont huit mille encore parlées à travers le monde, sur les braises desquelles il faut souffler pour préserver notre richesse et nos altérités.
L’artiste parle de son héritage sensible et de ses lubies : la honte des patois, la résistance à l’uniformisation, la joie d’utiliser une langue non normalisée, et la perte de la transmission, car avec les mots disparaissent aussi les savoir-faire, les savoir-être au monde. Le musicien Alain Larribet habille ce « concert parlé » de chants vibrant de liberté et de sonorités lumineuses. Leur duo parvient à nous conduire jusqu’au plus intime de nous-même, au creux de cette langue maternelle enfouie, berceau secret des premiers mots d’amour…

Bien sûr oui ok

Un comédien se lance dans une recette de génoise. Cuisson : 8 minutes. Tout en fouettant les œufs et en blanchissant le sucre, il se met à pétrir les mots avec gourmandise en décrivant ses gestes culinaires en apparence si anodins. Entre digressions, mauvais goût et réflexions sur la vie, il va nous plonger dans des questionnements aussi simples qu’essentiels, aussi drôles que philosophiques.

Nicole Genovese propose ici une initiation joyeuse au théâtre contemporain et s’empare du thème de la pâtisserie pour mieux nous parler de « pâte » humaine. Il sera question de cuisine, mais aussi de magie, de Moyen Âge, de Georges Bataille et d’économie générale… et d’un bon outil pour nous aider à traverser le monde dans lequel nous vivons : l’humour. Un spectacle imaginé pour les collégiens, à savourer aussi bien en salle de classe que dans un lieu de représentation plus classique.

Loss

Après que Rudy, un adolescent de 17 ans, s’est jeté sous un train à la sortie du lycée, ses proches refusent le deuil : sa mort n’est pas acceptable. Avec Loss, la metteure en scène Noëmie Ksicova se questionne sur notre relation au tragique dans une société qui semble l’éluder, voire le proscrire. Comment vivre la maladie, la mort, la folie ? Elle propose une immersion au sein d’une famille qui tente de ramener à la vie l’être disparu, quitte à accepter que la petite amie du jeune défunt en emprunte les vêtements, les habitudes, puis la place. Un huis clos à l’aura mythologique qui, plutôt que de juger la « démence » des actes, souligne l’héroïsme tragique d’un Orphée aux Enfers abrité dans des existences ordinaires.